Dans quelle étagère ? Partager les petits trésors de ma bibliothèque

Vitrail et Vitriol

Les turpitudes du professeur Godigore
de Thierry Gilhodez

Le livre que j’ai envie de partager avec vous date de 2003, il est de Thierry Gilhodez, maître verrier, meilleur ouvrier de France.

Je vous parle de lui parce que cet artiste est mon voisin (en Cévennes, on est voisin si les demeures ne sont pas éloignées de plus de 15 kms !). Je le considère comme un ami (si l’amitié tient au plaisir du partage et de la rencontre). Il habite à Cardet, dans la plaine viticole à l’ombre des monts où il est conseiller municipal chargé de la culture et pour une fois qu’une fonction s’accorde à l’homme et vice versa, on ne va pas s’en plaindre.

Son atelier est un endroit de découverte, car Sylvie son épouse aussi est artiste et y expose ses œuvres. C’est un hâvre de paix où circule un souffle sacré (sic), un lieu de conception où il fait bon s’attarder à parler avec le maître des lieux qui accepte de délaisser le temps d’une visite son travail pour expliquer, montrer, faire plaisir.

Le métier, l'art de Thierry c’est le vitrail, mais pas seulement, il travaille le verre et en fait des merveilles de toutes sortes, totem, mobile...

Cet homme a beaucoup de cordes à son arc (et à sa guitare), musicien de jazz, peintre à ses heures et un talent qu’il ne divulgue pas : écrivain.

Pour le remercier de l’accueil fait à notre spectacle Dom Juan Elvire 1699 qu'il avait invité dans sa commune, je lui avais offert le texte de la pièce dont j’étais l’auteure,  en retour il m'a offert Vitrail et Vitriol et il m’a glissé en rougissant, moi aussi j’écris. 

Voilà comment ce petit opuscule est arrivé sur mes étagères.

Ce livre étrange est un OVNI. On y trouve des poèmes fort beaux, des pastiches amusants, des éléments sur le travail du verre avec peut-être des indications scientifiques fantaisistes.

Je cite. Par ailleurs, si l’expansion de l’univers avait été plus lente, la matière cosmique se serait complètement transmutée en fer ; augmentant l’optimisation du coefficient de dilatation des poutrelles métalliques du Viaduc des Fades.

Je m’interroge encore sur la constante de Boyeldieu Picard . Existe-t-elle ou n’est-elle que le fruit de l’imagination de l’auteur ? J'ai trouvé sur le WEB un Boyeldieu architecte, un autre jardinier un troisième garde champêtre mais pas de physicien. Cela ne veut rien dire, le WEB n'a pas la science infuse !

Coupe en verre fusionné et thermo formé 

photographie de T. Gilhodez

On trouve également dans ce bouquin des pages pamphlétaires insérées là, mine de rien, comme Enquête page 31 ou Formation professionnelle page 46, car n’oublions pas que Thierry avait la vingtaine après ’68, ce qui fait de lui un contestataire conscient et constructif en même temps que mon contemporain (ce qui n’a aucun de rapport)!

Il met en scène un personnage (à n’en pas douter son jumeau) un certain professeur Godigore, dans différentes aventures, heureuses et malheureuses.

C’est drôle, surréaliste et agrémenté de magnifiques photos de vitraux.

La lecture de ces textes est rafraîchissante comme ces petits rosés de pays qui coulent tout seul, mais méfiez-vous ça laisse des traces. L’ivresse de la réflexion (du verre et de l’esprit) de ce livre aussi lumineux que son auteur. 

Je ne résiste pas à citer quelques phrases du préambule :

Lecteur nonchalant qui découvre ces lignes, prends garde à ton destin, car ce grimoire abscons nécrose les homélies de son fiel.

Referme vite ce livre pour préserver ton âme !

Il est déjà trop tard : la transmutation s’opère à ton insu comme elle a transformé le vitrail en vitriol…

…Que les diables te soient cléments et les démiurges favorables.

Je crois que le livre est encore sur www.ceramic.com et aussi à l'atelier de l'artiste à Cardet dans le Gard..

Les derniers vitraux de Thierry sont visibles à Saint Martin de Corconac.