Le Royaume d'Emmanuel Carrère
Le Prix du journal Le Monde 2014.
Résumé : La naissance du christianisme pour les Nuls, au travers essentiellement d'une exégèse assez amusante des écrits de Luc racontant la vie de Paul, lui-même faisant référence à sa vision personnelle de Jésus qu'il n'avait pas connu personnellement... mais qui lui était apparu sur le chemin de Damas... le tout sur fond d'histoire Judéo-Gréco-Romaine qu'il rend accessible même au lecteur le plus dépourvu de culture.
Extrait p 630: Ce livre que j'achève là, je l'ai écrit de bonne foi, mais ce qu'il tente d'approcher et tellement plus grand que moi que cette bonne foi, je le sais, est dérisoire; Je l'i écrit encombré de ce que je suis: un intelligent, un riche, un homme d'en haut: autant de handicaps pour entrer dans le Royaume.
Simone Weil, citée par l'auteur :
"En matière spirituelle, toutes les prières sont exaucées. Celui qui reçoit moins, c'est qu'il a moins demandé".

Mon Avis: Après avoir écouté l'auteur interviewé par François Busnel à la Grande Librairie, j'avais eu très envie de lire son roman. Eh bien, c'est fait et j'en suis sortie un peu déçue. J'attendais, comme les critiques nous l'avait annoncé, un Grand Roman, or j'ai découvert un Long, trop long roman autobiographique où les petites méditations métaphysiques de cet auteur un tantinet névrosé, qui vit (déconnecté du monde de la rue) entre Saint-Sulpice, le Boulevard St Germain et la Suisse, m'ont un peu lassée. Ayant parfois l'impression que l'histoire qu'il nous raconte servait surtout d'écrin à son ego.
En revanche, son autodérision m'a fait lui pardonner (terme si christique) le reste.
J'ai bien aimé sa façon de comparer l'Eglise chrétienne montante à une entreprise et ses succursales, Paul à Trotski et Jacques à Lénine ainsi que le sac de Jérusalem à la guerre de Tchétchénie C'est tout à fait jouissif. J'ai aimé ce décalage, qui apparaitra à d'autres, déplacé. Il déconstruit un peu l'hagiographie au profit d'un récit d'aventure, en forme de péplum de Cinecita, qui nous ballade dans l'immense empire romain du Ier siècle, où le courrier circule de la Syrie à Rome, où Paul ne cesse de voyager et de prêcher. Dans le roman d'E. C., Paul (ex Saul) semble être un inoffensif illuminé, c'est tout de même peu compter avec sa véritable nature de rigoriste totalitaire pour qui le plaisir de la chair est à bannir.
L'auteur montre bien comment les visions du monde s'opposent. Celle des Grecs et les Romains (la vision d'Ulysse décrite par Luc Ferry) ) pour laquelle notre vie sur Terre est le bien le plus précieux et la vision chrétienne selon laquelle ce qui compte c'est le monde qui se situe au-delà de la mort.
Emmanuel Carrère, dans ce livre, fait plutôt oeuvre de conteur, qui multiplie les points de vue et les anecdotes, que d'historien.
À lire pour l'humour, l'écriture fluide, la documentation citée, l'univers de cet auteur.

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